« Un livre au coin du feu », c’est votre rencontre littéraire made in Combat, présentée par Nicolas Houguet, autour d’une ou d’une auteur-e de son choix.
Vendredi 30 avril, à 20h, on part à la rencontre d’Erwan Lahrer et de son livre Indésirable, paru chez Quidam.
Pour vous inscrire, c’est par ici !
Plaisir d’écrire, joie de lire.
Il y a cela chez Erwan Larher. Ce terme habituellement si galvaudé de « jubilation » en écriture. On l’imagine à sa table, souriant de son mauvais coup. Un écrivain m’a dit un jour « n’oublie jamais qu’écrire, c’est jouer ». Et cette dimension, malicieuse et ludique, même aux heures les plus graves est ce qui m’a attaché à l’univers d’Erwan.
Dans son dernier roman, Indésirable, paru chez Quidam, Sam arrive dans un village pour acheter une propriété qu’il va retaper. Or, le genre de ce protagoniste est indéfini, neutre. Bientôt, la petite communauté va bruisser de toutes sortes de rumeurs autour du nouveau venu. Cela fait songer à la défiance qu’autour de lui déchaine « l’homme sans nom » de Sergio Leone quand il débarque dans une bourgade de Western. Une population en proie à ses pulsions va peu à peu se dévoiler comme dans La Poursuite Impitoyable de Arthur Penn. L’inconnu va révéler les vraies natures, les préjugés, les violences latentes. Cela va bouleverser les existences d’un milieu clos, où tout le monde se connaît. Amener du nouveau et du bouleversement comme un grand courant d’air. Provoquer de la fascination et du mystère. Ce qui rend son sel à des existences qui manquaient de rebondissements. Cela entraine une intrigue qui vous tient en haleine jusqu’à la dernière page, un groupe finement analysé dans toutes ses nuances, dans toutes ses outrances également.
Car Erwan souvent, parle des disparus, des privés de fictions, de ceux qui passent entre les mailles du filet de la littérature. Il leur donne un espace, à ces gens qu’on voit finalement assez peu dans les livres, à leurs contradictions, à la province qu’il traite avec tendresse et sincérité (sans la pointe de condescendance avec laquelle on la contemple d’ordinaire). Il en fait un espace narratif. Enfin, comme son personnage principal est d’un genre neutre, il fera usage, pour l’évoquer, de l’écriture neutre (où ni le masculin, ni le féminin ne l’emporte et où le doute demeure). Cela bouscule et déstabilise le lecteur dans ses idées préconcues, le plongeant exactement dans la même perplexité que les villageois quand ils découvrent Sam. Suggérant également que l’on n’est pas meilleur qu’eux, pataugeant strictement dans les mêmes préjugés.
Parler littérature avec Erwan Larher, c’est parler de passion. De sa façon de ne jamais cesser de lire et de mettre en avant les livres qu’il aime, jusqu’à en glisser des clins d’œil dans son propre travail. C’est contempler un art vivant, espiègle, profond, qui continue d’explorer toutes ses possibilités. Erwan écrit avec la même exubérance qu’un savant fou dans son laboratoire (du moins, c’est ainsi que j’aime à l’imaginer). Il joue avec les mots, avec les conventions, fait naitre des sourires là où on ne les attendait pas forcément. Il prend à contrepied, il pose un univers, et mine de rien, roman après roman, il poursuit une œuvre, qui vibre d’échos et d’intertextualités.
Pour cette rencontre, j’avais envie d’évoquer ce bonheur d’écrire que l’on sent en lui. De célébrer avec lui la littérature comme elle ne devrait jamais oublier d’être : Joyeuse, audacieuse, inventive.
